Dessin et modèle ou droit d’auteur : peut-on cumuler les protections ?
Situation
Le Code de la propriété intellectuelle (article L.112-2, 10° CPI) indique que les œuvres des arts appliquées peuvent être protégées par le droit d’auteur. Dans le même temps, ce même code prévoit que l’apparence d’un produit (défini comme « tout objet industriel ou artisanal, notamment les pièces conçues pour être assemblées en un produit complexe, les emballages, les présentations, les symboles graphiques et les caractères typographiques, à l'exclusion toutefois des programmes d'ordinateur ») peut être protégée à titre de dessin ou modèle.
Réaction
Pour pouvoir bénéficier d’un éventuel « cumul » de ces deux protections, il est nécessaire de répondre aux conditions spécifiques de chacun de ces droits, qui s’ils peuvent se cumuler ne peuvent pas être confondus.
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DESSIN ET MODELE |
DROIT D’AUTEUR |
Conditions d’octroi de la protection |
Dépôt d’une demande d’enregistrement (et paiement d’une redevance) |
N’exige aucune formalité de dépôt, Conserver la preuve de l’antériorité de sa conception. |
Critères d’obtention de la protection |
Nouveauté et Caractère propre Les critères s’apprécient par rapport au contexte et au marché du produit concerné |
Originalité (définie comme « l’empreinte de la personnalité de l’auteur ») Elle s’apprécie pour elle-même, par rapport à la personnalité de l’auteur et non, en principe, par rapport au marché concerné. |
Durée et date de début de la protection |
5 ans, renouvelables jusqu’à 25 ans au total ; À partir de la date du dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle. |
Jusqu’à 70 ans après la mort de l’auteur À compter de la création (nécessité de conserver la preuve certaine de cette date) |
Démonstration initiale à apporter pour agir en contrefaçon |
Preuve de la titularité du dessin ou modèle ; Preuve que le titre est en vigueur |
Preuve que la création est originale Preuve de la date de la création |
Critère d’appréciation de la contrefaçon |
Reproduction d’une même impression visuelle d’ensemble sur l’observateur averti. |
Reprise des caractéristiques originales de l’œuvre (c’est-à-dire de celles qui portent l’empreinte de la personnalité l’auteur) |
Concrètement
Un styliste qui a dessiné un pull fluide, à manche longue, associant également un ornement à l’épaule évoquant l’univers militaire conformément à une tendance actuelle à ce moment-là, et dans un secteur où l’état de l’art est déjà assez saturé, pourrait avoir un intérêt à déposer une demande de dessin et modèle, car dans ce cadre, il pourrait être considéré que l’utilisateur averti, auquel il est fait référence en matière de dessins et modèle, sera plus sensible à certaines différences, même de détail, alors que pareilles caractéristiques ne permettraient pas de caractériser un effort créatif et une empreinte de la personnalité du styliste aux yeux du consommateur pris pour référence dans le cadre du droit d’auteur. Le passage par un dépôt d’un dessin et modèle pourra en effet offrir une protection plus objective et moins évidente à contester.
D’un point de vue pratique, les critères de protection en matière de dessin et modèle sont potentiellement plus faciles à satisfaire qu’en droit d’auteur.
S’appuyer sur les deux droits est donc un atout !
Because yoonozelo
La divulgation d’un dessin ou modèle faite par l’auteur ne lui est pas opposable dans le cadre du dépôt d’une demande d’enregistrement si ce dépôt est réalisé dans les douze mois suivants. Le créateur qui commence donc à exploiter ou à communiquer publiquement au sujet de sa création ne doit donc pas attendre plus d’un an s’il souhaite envisager un cumul de protection grâce au dessin et modèle.